18:09 / 17 novembre 2013 / Muriel Epstein Comptes-rendus
L’accompagnement à l’auto-didaxie
Par Muriel Epstein
Mercredi 13 novembre, à l’université de Nanterre, Pierric Bergeron, documentaliste au lycée pilote innovant international (LPII) de Poitiers qui a été, en France, le premier “lycée numérique” a soutenu sa passionnante thèse de sciences de l’éducation.
Ses travaux seront publiés prochainement, je vais juste en reporter quelques phrases que j’en ai comprises et qui m’ont marquée par les échos que j’y ai trouvés, tant avec Transapi qu’avec mes propres recherches et qui devrait interroger sur l’enseignement, la refondation de l’école, et qui donnent des pistes fortes sur la prévention du décrochage scolaire et l’usage du numérique.
Espace d’accompagnement à l’auto formation
C’est une des définitions possibles du LPII.
J’ai particulièrement aimé la notion d’accompagnement à l’autodidaxie. C’est à dire que les jeunes du LPII, après leur scolarité, ont gardé une habitude de l’autoformation. Le lycée a appris à apprendre, ce qui me semble extrêmement important. De même qu’apprendre à lire permet ensuite d’apprendre tout ce qu’on trouve dans les livres, apprendre à utiliser les outils numériques ouvre des champs immenses. L’autodidaxie se fait aussi à travers les apprentissages informels. C’est souvent sur le sujet des outils numériques que les jeunes apprennent entre eux, sans l’aide d’un enseignant. La mise en réseau modifie aussi globalement l’apprentissage. Cela devrait d’ailleurs être un axe de recherche fort!
Le groupe
Pierric a également parlé des relations constructives des élèves en dehors des cours, de l’importance de la pédagogie de projets de groupe. Autant d’éléments que j’ai retrouvé dans mes recherches. Les plans de lutte contre le décrochage scolaire qui fonctionnent, les lycées qui réussissent à combattre le décrochage scolaire sont ceux qui mobilisent les élèves en groupe. Ce n’est pas une immense nouveauté, mais il faudrait que ce soit dans la tête de tous les enseignants. Pierric (qui m’excusera je l’espère si je déforme ses propos), a mentionné le passage d’un modèle utilitariste de l’école (“je suis là pour avoir mon bac”) à un modèle projectif via une identité collective forte. Il a, alors, parlé de sérendipité active, “trouver ce qu on ne cherche pas en cherchant ce qu’on ne trouve pas”.
Le suivi des élèves sur le long terme comme alternative à l’évaluation des performances
J’ai écrit une communication au congrès de l’AREF 2013 où je disais que les notes étaient une mauvaise réponse à la bonne question de l’évaluation. La réussite est un temps long d’insertion professionnelle. Pierric Bergeron défend le fait que l’évaluation des établissements innovants se fassent non pas à court terme sur les notes mais à long terme sur l’épanouissement des adultes et leur insertion sociale.
Les ESPI (Établissements Scolaires Publics Innovants)
Les ESPI, c’est à dire entre autre le CEPMO (Oléron), le CLEPT (Grenoble), le LAP (Paris), le LPII (Poitiers), le CLE (Hérouville Saint Clair), sont pour beaucoup beaucoup des écoles au service des “éclopés ” de l’école. Bien que répartis sur tout le territoire français, Ils n’accueillent que 2000 jeunes par an.
Le LPII est un modèle de réussite alternatif qui questionne le modèle dominant car cela concerne tout le monde, c’est un des rares établissements innovants qui n’est pas “spécialisé” dans les élèves “en difficulté”. Il a néanmoins en commun avec eux une vision globale de la réussite intégrant le bien être.
A l’issu de sa soutenance, on avait tous envie d’être élève dans un ESPI et de créer de l’enseignement autrement pour des jeunes épanouis… De quoi savoir qu’il faut qu’on continue Transapi!